L’assiette au beurre, un journal satirique illustré de la Belle époque
Parmi les 11.000 titres de presse conservés à la bibliothèque d’étude et du patrimoine, on trouve quelques pépites, dont un célèbre journal satirique paru entre 1901 et 1936 (mais la bibliothèque n’a que les 11 premières années), remarquable autant par les idées et le ton employé que par la qualité des illustrations : il s’agit de L’assiette au beurre – titre on ne peut plus évocateur !
Cet hebdomadaire de la Belle époque illustré en couleurs avait pour ligne éditoriale la satire des mœurs et de la société du début du 20è siècle. Chaque numéro était consacré à un thème précis et mis en images par un artiste particulier ou par un groupe de collaborateurs de la publication, l’ensemble offrant une peinture virulente du sujet traité. Il en a résulté une émulation entre les artistes au fil des numéros. L’assiette au beurre par sa cohérence de ligne et sa subversion a marqué l’histoire de la caricature en France. C’est un journal satirique polémique qui n’a cessé de prendre pour cibles les institutions de la IIIe République.
La revue, dont le prix était relativement élevé, s’adressait à une bourgeoisie aisée située politiquement plutôt à gauche, en tout cas prête à accueillir favorablement certaines idées « subversives ».
L’assiette au beurre, n°87, novembre 1902
Des artistes étrangers, dont un certain nombre originaires d’Europe centrale ont collaboré au journal. On peut dire que si l’esprit expressionniste s’est manifesté en France, c’est bien grâce à L’assiette au beurre. Ce n’est pas un hasard si Van Dongen, qui appartiendra à la fois au mouvement fauve et au groupe expressionniste allemand Die Brücke, illustre quelques numéros.
De nombreux artistes qui laisseront un nom dans l’histoire de la peinture moderne exercent leur talent avec bonheur dans le journal : Jacques Villon, Kupka, Felix Vallotton, Juan Gris,… Ces artistes réalisent des chefs-d’œuvre graphiques d’une grande hardiesse.
La liste des collaborateurs de L’assiette au beurre est impressionnante. Des noms reviennent assez fréquemment : ceux de Jossot, Grandjouan, Leal de Camara, Max Radiguet, Roubille, Ricardo Florès… La plupart sont, souvent injustement, tombés dans l’oubli malgré leur talent. Des écrivains célèbres comme Anatole France, Octave Mirbeau, Léon Bloy participèrent également à la revue.