La tradition de la « galette des rois » à Toulouse
Les origines de la galette
Les racines historiques de la galette ne sont pas religieuses mais peuvent se rattacher aux fêtes romaines : les saturnales. Durant les réjouissances et les banquets qui les accompagnent, les Romains désignent un esclave comme « roi d’un jour ». Celui-ci est tiré au sort au moyen d’une fève contenu dans un gâteau et dispose du pouvoir d’exaucer tous ses désirs. Pendant quelques heures, les hiérarchies sociales sont inversées : les esclaves commandent à leurs maîtres et ceux-ci les servent à table. Mais une fois les fêtes terminées, retour à la dure réalité pour l’esclave qui retrouvait sa condition.
La tradition de la galette des rois apparaît dans la société française dès le Moyen Âge. Elle renvoie, au fil des siècles, aux semailles et au blé, à la farine et au pain avec toutes les symboliques qui y sont associées. Mais également au jeu de hasard par la désignation d’un « roi » qui est celui qui trouve la fève dans la part de galette qui lui est attribué. La coutume du « roi boit » est attestée dès le XIVe siècle et signifie que celui qui trouve la fève doit payer sa tournée à la tablée.
Pour les chrétiens, le partage de la galette est également associé aux rois mages : Melchior, Gaspard et Balthazar célébrés le jour de l’Epiphanie, connu sous le nom de Jour des Rois ou Fête des Rois.
Toulouse et la galette au 18e siècle…
La Bibliothèque de Toulouse possède un ensemble de huit manuscrits connu sous le nom «Les heures perdues de Pierre Barthès, maître répétiteur en Toulouse, ou recueil des choses dignes d’être transmises à la postérité, arrivées en cette ville ou près d’icy… »
Durant 43 ans, de décembre 1737 à décembre 1780 Pierre Barthès, petit bourgeois toulousain va recenser des événements (exécutions, fêtes, processions religieuses…) et autres faits divers qui vont se dérouler à Toulouse pendant cette période.. « Les Heures perdues de Pierre Barthès… », sont une source importante pour l’histoire et la vie toulousaine. La coutume concernant le gâteau des rois y est mentionnée entre 1752 et 1774 pour certaines années.
Dès le 16e siècle, boulangers et pâtissiers se lancent dans une guerre féroce pour obtenir le monopole de la vente du gâteau des rois. François Ier accordera, par arrêt, le monopole aux pâtissiers. L’arrêt sera confirmé par le Parlement de Paris a plusieurs reprises jusqu’en 1717, arrêt qui interdit aux boulangers « de faire et de donner aucune pâtisserie et de ne pas employer de beurre et des œufs dans leur pâte, ni même de dorer leur pain avec des œufs ». Si l’arrêt est suivi à Paris, il ne l’est pas à Toulouse ainsi que dans la plupart des provinces. Les boulangers continuent à fournir les gâteaux de rois comme il est d’usage.
Néanmoins, à la lecture des chroniques de Pierre Barthès, il semble que les boulangers toulousains, qui donnent habituellement à leurs clients le fameux gâteau des rois pour l’Épiphanie, suppriment régulièrement cette pratique.
Ainsi le 6 janvier 1752, Pierre Barthès mentionne que « les boulangers de la ville, à cause de la cherté du blé, suppriment les gâteaux des rois qu’ils avaient l’habitude, chaque année, de donner à leurs pratiques à cette date »
Cette suppression se poursuit en 1759, 1778 et en 1789 en raison de la cherté des denrées.
Il faudra même que les Capitouls de Toulouse interviennent en 1760 et par ordonnance en 1774 afin d’ obliger les boulangers à donner à leur clients le gâteau des rois sous peine d’amende.
A la Révolution française, la tradition perdure mais le nom change, la « galette des rois » devient « la galette de l’Egalité » et la fève disparaît afin de poursuivre la tradition du gâteau partagé mais sans l’élection d’un roi.
De nos jours la galette offerte chaque année au Président de la République ne cache aucune fève, en souvenir de l’héritage de la Révolution française.