Quelle est la meilleure histoire de Noël ?

Firmin Bouisset, [Enfants avec des jouets sur fond de sapin de Noël], affiche avant la lettre, v. 1890-1900, Gallica

Noël est traditionnellement une fête chrétienne qui célèbre la naissance de Jésus. Les récits bibliques content une vierge donnant naissance au Christ, des anges qui apparaissent devant des bergers et des Rois mages qui viennent de loin pour voir le bébé Jésus dans sa crèche et lui apporter des présents. Si dans la première moitié du 20e siècle, nos aînés célébraient encore par ces récits l’une des fêtes les plus importantes du christianisme, nous avons aujourd’hui échangé cette histoire pour celle du Père Noël descendu du ciel pour apporter des cadeaux à tous les enfants en passant par la cheminée. Pourtant, l’histoire de Noël est encore plus ancienne. Elle a remplacé différentes fêtes païennes liées au solstice d’hiver, période de renouveau associée à la fertilité et à la procréation.

La fête de Yule dans les cultures germanique et scandinave

Dans les pays nordiques et germaniques, les Vikings fêtaient le solstice d’hiver avec « Yule ». Alors que le Nord de l’Europe était plongé dans l’obscurité pour de longues semaines d’hiver, la fête de Yule permettait à l’âme du soleil de redescendre lors du solstice d’hiver le 21 décembre. À cette date, les jours commençaient à rallonger : c’était la renaissance du soleil, la victoire de la lumière sur l’obscurité.

La christianisation des peuples germaniques a permis un syncrétisme en associant les fêtes de Yule et de Noël. L’arbre de Noël décoré de lumières viendrait des traditions de la culture scandinave et germanique : le sapin serait une référence à l’arbre-monde dans la mythologie nordique, un arbre sacré qui prend appui sur la terre et monte vers le ciel.

[L’arbre-monde Yggdrasil], 17e siècle, Institut Árni Magnússon (Islande), Wikicommons

L’étoile au dessus du sapin ferait, quant à elle, référence à l’étoile polaire.

La fête des Saturnales dans l’Empire Romain

Dans la Rome antique, du 17 au 25 décembre, on célébrait les Saturnales, données en l’honneur du Dieu Saturne et liées au solstice d’hiver. Elles s’achevaient le 25 décembre, au moment de la renaissance du soleil. Durant ces 7 jours de fête, toutes les activités s’arrêtaient, militaires, judiciaires comme agricoles. On décorait les maisons de branches de sapin, de houx, de gui et on se rassemblait en famille et entre amis pour de copieux repas. Pour quelques jours, on vivait sous le règne de Saturne pour qui « les mortels vivaient comme les Dieux » : les maîtres servaient leurs esclaves et on désignait un roi des Saturnales issu du peuple. On fabriquait et on s’offrait de petits cadeaux.

Antoine Callet, Les Saturnales, 1783, Wikicommons

La fête du « Sol invictus » dans l’Empire romain

En 274, alors que l’Empire romain occidental commençait à se déliter, une nouvelle fête apparut, nommée « Sol invictus », le soleil invaincu, fêtée le 25 décembre. Elle fut inspirée par les figures du dieu grec Apollon et de Mithra, un dieu indo-iranien populaire dans l’armée romaine, qui serait né un 25 décembre. Ce culte se terminait par le sacrifice d’un taureau, correspondant à la naissance du jeune dieu solaire qui était censé surgir d’un rocher sous la forme d’un jeune homme.

La fête de Noël en Occident

Les trois premiers siècles de son existence, la religion chrétienne ne célébrait pas la naissance de Jésus dont elle ignorait d’ailleurs la date. Au 4e siècle après J.-C., chrétiens et païens s’affrontaient, menaçant l’unité de l’Empire romain d’Occident. L’Empereur Constantin décida de les réconcilier en faisant coïncider les célébrations religieuses des deux camps. Il fixa ainsi dans un décret la date du 25 décembre comme date de naissance de Jésus, cette même date devenant à la fois le jour de la fête de Noël et de Sol invictus. Il devenait ainsi plus facile de convertir la population au christianisme en se fondant sur les traditions profanes.

Livre d’Heures. Nativité du Christ, enluminure, 14e siècle, Rosalis

Après la chute de l’Empire romain d’Occident, les fêtes païennes de l’Empire romain ainsi que Yule furent remplacées progressivement par la fête de Noël. Il fallut encore attendre 2 siècles pour que Noël se généralise dans le monde occidental.

Durant le Moyen Âge, Noël devint une des fêtes les plus importantes du christianisme. De nombreuses réjouissances, chants, danses et repas entre amis ponctuaient cette célébration, de même que la messe de minuit.

Les Très Riches Heures du duc de Berry. La messe de minuit, enluminure, 15e siècle, Musée Condé, Chantilly, Wikicommons © Photo. R.M.N. / R.-G. Ojeda

Les enfants, souvent costumés, allaient de maison en maison pour chanter leurs vœux et recevaient en échange des fruits, des gâteaux ou de la monnaie. À partir du 12e siècle, les célébrations religieuses furent accompagnées de drames liturgiques, les « mystères », qui mettaient en scène l’adoration des bergers ou la procession des mages.

Les premières crèches firent leur apparition dans les églises et couvents au 16e siècle. Elles se répandirent dans les maisons des nobles au 17e siècle, transformant Noël en une fête familiale plus intime.

Durant les siècles suivants, la fête entra dans les couches populaires.

Emile Schweitzer, Foire de Noël sur la place Kléber en 1859, 1894, Gallica

En Allemagne notamment, puis dans le reste de l’Europe, la fête de Noël commença à se centrer sur les enfants au 19e siècle.

Le Petit Journal, 29 décembre 1807, n° 893, Rosalis

L’origine du Père Noël

Le personnage de Père Noël fut inspiré de Saint Nicolas, le patron des enfants, qui est fêté le 6 décembre en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique et dans le Nord et l’Est de la France.

Paul Kauffmann, La Saint-Nicolas, 1902, Gallica

Tous deux présentent des caractères communs : une longue barbe blanche, des vêtements colorés (mauves et blancs pour l’évêque devenus rouges et blancs), un air bienveillant. Et des rennes attelés à un traîneau pour le Père Noël, alors que Saint Nicolas voyage à dos d’âne.

A Merry Christmas, carte postale, s.d., Wikicommons

La fête de Saint-Nicolas et le folklore germanique de Noël arrivèrent aux États-Unis avec les vagues migratoires allemandes et hollandaises dès le 17e siècle. Le personnage du Père Noël connut par la suite divers changements, notamment vestimentaires, et prit peu à peu un caractère commercial. Après la Seconde Guerre mondiale, la vision laïcisée de Noël venue des États-Unis s’étendit dans le reste du monde occidental. La fête perdit progressivement son caractère religieux. En revanche, les valeurs de famille et les traditions issues du monde germanique – les lumières, les cadeaux et le sapin – sont restées populaires.

Le Monde illustré, 21 décembre 1895, n° 2021, Gallica
Paul Kauffmann, Noël : La messe de minuit, 1902, Gallica
Agence Rol, Fillette devant un arbre de Noël garni de jouets (Cnews), photographie de presse, 1925, Gallica

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