Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France : chefs d’oeuvres en péril

Monument éditorial du XIXe siècle, les Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France sont un fervent plaidoyer pour la sauvegarde du patrimoine national.

Page de titre du deuxième volume, 1ère partie

Une initiative du baron Taylor

Nés de la volonté du baron Isidore-Justin Taylor (1789-1879), grand voyageur en Europe et en France, les Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France ont pour but d’éveiller les consciences, de faire connaître, de sauver de l’oubli et de la destruction les monuments du passé de la France.

Le propos est de parcourir le pays, province par province, cette France ancestrale, en partie détruite ou abîmée par les excès révolutionnaires, d’entamer un voyage à travers les villes, les villages, les ruines pour les décrire, les dessiner, en expliquer l’histoire, en bref les mettre en lumière.

Villeneuve, lithographie par Thierry frères, Ruines de l’église de Saint-Martin du Canigou, 1834, premier volume « Languedoc », 2e partie

Il est vrai que l’époque romantique raffole des ruines, des vestiges du temps. C’est le moment où se manifeste un regain d’intérêt pour le Moyen-Age, où apparaît le tourisme, le « Grand Tour », pour la classe aisée tout au moins.

Villeneuve, lithographie par Thierry frères et Engelmann, Ruines de Saint-Michel de Cuxa, 1834, premier volume « Languedoc », 2e partie

L’aventure éditoriale

En juillet 1820, des articles de presse annoncent le lancement de l’ouvrage, vendu par souscription chez l’éditeur Didot et destiné à paraître en livraisons. Le projet est d’éditer 24 volumes, illustrés de 3000 lithographies signées des plus grands artistes de l’époque.

Dauzats (dessin et lithographie), Les environs d’Albi – Porte de Cordes, 1833, volume « Languedoc »

Le baron Taylor travaillera en liaison avec une équipe de près de 300 écrivains, dessinateurs, lithographes. Outre Charles Nodier, qui rédige des textes historiques empreints de la poésie romantique des légendes traditionnelles, et Alphonse de Cailleux qui apporte un soutien politique et administratif, il amenera à collaborrer au projet, Géricault, Ingres, Viollet-le-Duc, Adrien Dauzats…

Les illustrations lithographiques

Pour illustrer les Voyages, le baron Taylor décide d’utiliser le procédé nouveau de la lithographie. Plus libre et rapide que le burin, cette technique est idéale pour fixer des dessins pris sur le vif par les voyageurs. Taylor envoie sur place des dessinateurs qui prennent des croquis puis entrent en scène les lithographes qui reportent les dessins sur la pierre et complètent la composition avec des personnages, des effets d’ombre et de lumière.

Dauzats, lithographie par Engelmann, Grande place d’Albi, 1833, volume « Languedoc »

Au fil du temps – l’édition durera quasiment 60 ans de 1820 à 1878 – le baron Taylor devient véritablement le maître d’oeuvre de l’ouvrage après l’abandon de Nodier. C’est lui qui rédige alors une grande partie du texte et collabore à l’illustration.

Chapuy, lithographie par Engelmann, Vue générale extérieure de Saint-Saturnin, 1833, volume « Languedoc »

L’écho du Romantisme

Au final, même si le projet reste inachevé, le résultat est à la hauteur de l’ambition. Les Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France sont l’exaltation de l’histoire de la France à travers tous ses monuments et sites naturels.

Gigoux, Deroy, Les environs d’Albi – Ruines du château de Penne, 1833, volume « Languedoc »

Ils ont changé le regard, suscité la création de l’inspection des Monuments Historiques et fait dire à Victor Hugo :

« Si les choses vont encore quelque temps dans ce train, il ne restera bientôt plus à la France d’autre monument national que celui des Voyages pittoresques et romantiques, où rivalisent de grâce d’imagination et de poésie le crayon de Taylor et la plume de Nodier ».

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